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L’idée d’une obsolescence programmée n’a rien d’une théorie du complot. Depuis des décennies, une grande partie des produits que nous achetons est pensée pour ne pas durer. L’émission Thema diffusée il y a très longtemps sur Arte en 2012 avait déjà tiré la sonnette d’alarme, montrant comment les fabricants planifient la fin de vie de leurs produits pour entretenir la machine économique. Treize ans plus tard, rien n’a vraiment changé... pire, le principe s’est perfectionné.
Le reportage d’époque citait des exemples emblématiques : des collants féminins devenus fragiles par décision marketing, ou encore des imprimantes équipées de puces limitant artificiellement leur durée de vie. Le constat reste tristement d’actualité. Aujourd’hui, les constructeurs utilisent d’autres leviers : pièces inaccessibles, logiciels verrouillés, ou encore batteries scellées dans les appareils. La stratégie est la même : pousser au remplacement plutôt qu’à la réparation.
Dans l’automobile, c’est encore plus subtil. Les calculateurs électroniques sont parfois codés pour bloquer certaines réparations sans passage en concession, et les pièces d’origine deviennent rapidement introuvables. Les véhicules modernes embarquent jusqu’à 80 calculateurs électroniques, chacun pouvant être le maillon faible d’une chaîne coûteuse à maintenir. Et évidemment, cela rapporte.
Les voitures ne font pas exception. Croire qu’elles échappent à la logique du jetable, c’est ignorer la réalité industrielle. Les constructeurs savent très bien calibrer la durée de vie moyenne de leurs pièces. Certaines boîtes automatiques sont scellées “à vie”, sans possibilité de vidange, alors qu’en pratique l’huile se dégrade dès 60 000 km. Même logique pour les sondes, les injecteurs, ou les systèmes d’échappement : tout est calculé pour tenir un certain cycle avant de lâcher.
Les différences culturelles subsistent. Les voitures japonaises restent connues pour leur fiabilité exemplaire : pièces plus durables, matériaux mieux choisis, ingénierie plus conservatrice. Les garagistes le confirment encore aujourd’hui. À l’inverse, certaines marques européennes semblent accepter une durée de vie moyenne de 10 à 12 ans, histoire d’alimenter le renouvellement du parc.
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L’obsolescence ne se limite pas à la mécanique : elle est aussi esthétique et psychologique. Le design joue un rôle clé dans la perception du vieillissement. Une BMW Série 3 E46 paraît aujourd’hui datée face à une G20, alors que la différence technique est souvent minime. Le simple changement de silhouette suffit à donner l’impression que l’ancien modèle est dépassé. Les marques cultivent cette impression de “vieux” pour stimuler la vente du neuf. C’est une autre forme de mort programmée : celle du désir.
L’obsolescence programmée n’est pas un accident, c’est un pilier du capitalisme. Elle maintient la consommation et soutient une croissance devenue structurelle. Le système a besoin de pannes pour vivre. Sans remplacement régulier des biens, tout s’effondre. Pourtant, notre planète est finie et nos ressources le sont aussi. Produire toujours plus n’a pas de sens, sinon celui de faire tourner la machine économique jusqu’à la panne finale.
Les constructeurs n’ont aucun intérêt à prolonger la vie des produits. Prenons un exemple concret : des automobilistes changent encore leur vanne EGR simplement encrassée, alors qu’un nettoyage suffirait. Chaque remplacement, c’est de la production, du transport, des matières premières, et un bénéfice immédiat pour la chaîne industrielle. En termes économiques, on parle d’économie d’échelle : plus une pièce est produite, moins elle coûte à fabriquer, et plus la marge augmente si le prix de vente reste stable.
Un constructeur qui vend 100 000 pièces supplémentaires réduit son coût unitaire de plusieurs euros, tout en multipliant son profit global. Ce mécanisme s’applique à tout : des filtres à particules aux modules électroniques. L’industrie de l’auto a simplement intégré ce calcul à son modèle.
Heureusement, les choses bougent un peu. Depuis 2021, un indice de réparabilité est obligatoire en France pour plusieurs catégories de produits, dont les smartphones et certains appareils électroménagers. L’automobile n’est pas encore concernée, mais la pression monte. Des initiatives européennes évoquent la création d’un “droit à la réparation” qui forcerait les marques à fournir les pièces et logiciels nécessaires pendant au moins 10 ans.
Alors que des millions d’humains manquent d’eau, d’autres détruisent sciemment des produits parfaitement réparables pour préserver une croissance qui tourne à vide. Le plus ironique, c’est que ce cycle de surconsommation finit aussi par appauvrir les consommateurs. Ceux qui fabriquent ces voitures ou ces objets “intelligents” ne réalisent pas qu’ils creusent leur propre tombe industrielle.
Nous aimons croire que notre civilisation est avancée. Pourtant, elle persiste à confondre progrès technique et rentabilité à court terme. Si rien ne change, la mort programmée des produits finira par ressembler à celle de notre bon sens collectif.
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